L'enfant, Fan Fiction.

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Posted by: Croc de Loup.8215

Croc de Loup.8215

Je re-poste une Fan-Fiction, moins “agitée” que la première, mais surtout bien plus courte. En voici le début. Enjoy!

L’enfant

“Asseyez-vous!”
Dit le commandant Trahearne. Iryenna s’assit sur la chaise de bois, devant le bureau en chêne massif. Bien que l’on se trouvait dans le bureau du chef des armées du Pacte, le mobilier y était simple, et très peu orné. La petite salle avait pour seule décoration une cheminée dans laquelle brûlait tranquillement un feu, et quelques armes accrochées sur les murs en pierre grise, ainsi que deux bannières du Pacte, accrochées derrière le bureau. De l’autre côté de celui-ci, assis dans un grand fauteuil, Trahearne. Elle dégagea la mèche de cheveux rouges qui lui tombaient devant l’œil droit, puis regarda le Sylvaris dans les yeux. Il rompit le silence:
“Vous savez qu’Orr est une région désolée, et que vous risquez d’y rester un bout de temps. Cette guerre n’est pas pour les âmes sensibles…

-Vous ne savez pas d’où je viens…
-Effectivement… Mais je doute que ce que vous avez vécu soit pire que ce qui vous attend là-bas… Racontez-moi.
-Vous ne voulez pas savoir…
-Vous ne voulez pas vous le remémorer plutôt, non?
-Très bien… Alors écoutez-moi bien:

La fin me tenaillait, et me pliait en deux. J’étais assise dans la pièce qui à l’époque me servait de salon. La pièce qui nous servait de maison, perchée sur les toits du Promontoire, exiguë, étouffante l’été, glaciale l’hiver. Six étages à monter et à descendre, pour aller chercher l’eau, et la nourriture quand on en avait. Certains disent que beaucoup de gens pauvres se contentent de ce qu’ils ont, et sont heureux tels quels. Mais pas nous. Nous ne pouvions nous contenter de rien, puisque nous n’avions rien. J’avais mangé un bout de pain hier soir, et en ce début d’après-midi d’hiver, j’étais à jeun. Ma mère entra dans la salle, de retour d’un petit boulot, qu’elle avait effectué pour une misère. Pour nous une fortune. Elle tapota sa robe en lambeaux afin d’en faire tomber la poussière, essuya à l’aide d’un mouchoir son visage rouge et perlé de sueur, jeta sur moi un regard épuisé, triste, presque désolé. Je décidais donc de sortir afin d’aller mendier quelques pièces aux passants. Elle me vit partir, et me fit un triste sourire, mais plein de fierté et de gratitude. Je descendais les escaliers lentement, peu excitée à l’idée de me traîner dehors. Je croisais ma sœur Lilia, discutant avec deux autres enfants, aussi pauvres que nous. Je lui adressai un sourire qu’elle me rendit tendrement. J’avais onze ans, elle douze. Nous nous parlions peu, mais étions néanmoins très proches l’une de l’autre. Et je sortais donc, en cette fin de journée, mes longs cheveux incroyablement lisses, bruns, ondoyant au rythme de mes pas. J’étais à l’époque très fine, voir maigre, à cause du manque de nourriture. Dans ma petite robe rouge délavée m’arrivant aux genoux, je me dirigeais vers le quartier des commerçants, où le passage était plus important, et, une fois arrivée, je m’adossais à un mur, recroquevillée dans le froid de l’hiver, mes jambes à moitié seulement recouvertes par le coton de ma robe. Et j’attendis, regardant passer devant moi des dizaines et des dizaines d’hommes et de femmes, des dizaines de vies heureuses que je n’aurai jamais, même si je leur tendais les bras jusqu’à les toucher presque, les effleurer, sentir de près la si lointaine douceur du foyer, le doux parfum de la viande rôtie, la douce chaleur du poêle en hiver. Mais je n’aurai jamais que l’âcre odeur de poussière de notre taudis, la neutralité pourtant si réconfortante du pain, et la brûlure froide des soirs d’hiver. De temps à autre un passant me laissait une petite pièce dans le pot que j’avais posé devant moi, et je le gratifiais d’un regard, certes pitoyable, mais reconnaissant, car, frigorifiée, je ne trouvais pas la force de parler. Je me traînais ainsi de rue en rue pendant des heures, ne chassant même plus la neige qui s’accumulait sur mes genoux, et encore moins les idées noires qui ne faisaient qu’aggraver ma peine. Vers la fin de journée, un homme, grand, habillé de vêtements cossus, m’aborda gentiment, s’accroupissant devant moi:

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“Bonjour petite, ne reste pas là, tu vas attraper froid… Suis moi, je vais te donner une soupe, et tu pourras dormir au chaud ce soir.”

Plongée dans un état de semi hypothermie, je ne réfléchis pas et le suivit jusqu’à chez lui, son manteau sur mes épaules ».

Iryenna s’arrêta de parler, fixant Trahearne d’un œil comme embué. Après un long moment d’hésitation, e dernier risqua:

“Que s’est-il passé ensuite?
-Si je vous dis que je préfère ne pas en parler, vous devinez?
-Je vois…. Désolé…
-Ce n’est pas grave. Je continue:

Il me jetait donc, plusieurs heures plus tard, en tenue humiliante, dans la nuit noire hivernale, traumatisée et brisée. Je rentrais chez moi, le visage couvert de larmes glaciales, pieds nus, titubant dans la lumière dansante des torches sur un parquet de neige. Je passais les quatre prochains jours au lit, tordue de douleur sur mon fin matelas, ne dormant que d’un sommeil gâché par les cauchemars, et je me réveillais, couverte de sueur et parfois de sang. Plus jamais après cela ma mère ne m’envoya mendier, ni moi ni ma sœur qui ne sut jamais ce qu’il m’était arrivé. Ma misérable vie ne fut plus jamais la même, mais elle continua néanmoins, jour après jour, galère après galère… Un matin de janvier, un mois plus tard, nous vîmes, sur une petite place du nord du Promontoire, le corps sans vie de celui qui m’avait emmené en ce soir d’Hivernel. La corde au cou, les yeux picorés par les corbeaux, une pancarte à l’encre effacée clouée dans le dos. Jugé par ses pairs, sans pitié. Un témoin de la barbarie de ce monde… Préservant le secret, préservant ma sœur, je ne dis rien, et jetais un regard morne au cadavre. Le monde se portait mieux ainsi….

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Je prépare la suite, je vous promet l’histoire complète cet été. Bonnes vacances.

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Quelques jours plus tard, de bon matin, quatre Séraphins, parés de leurs lourdes armures de plaques argent et or, vinrent violement frapper à notre porte. Les Séraphins étaient les soldats du promontoire, et protégeaient toute la Kryte des peuples agressifs comme les Centaures, ou des créatures dangereuses. Ils se battaient non-seulement à l’extérieur du Promontoire, mais aussi à l’intérieur et s’occupaient des habitants. Il portaient tous des armures lourdes grises et or, et se baladaient armés en toutes circonstances. Ma mère se précipita pour leur ouvrir, mais ils la bousculèrent sèchement en entrant, la poussant en arrière et l’un d’eux fit, d’un ton sec:
" Vous devez de l’argent au Promontoire, cela fait un mois que vous devez payer…
-Nous sommes désolés messieurs… Mais regardez, nous avons à peine de quoi subsister…
-Cela ne nous concerne pas
-Nous ne pouvons pas payer!"
Ils nous regardèrent: ma sœur et moi, maigres, cernées, crasseuses. Puis ma mère, voutée, traits tirés, à bout…
" Suivez-nous".
Intima l’un d’eux, athlétique, aux yeux bleus, la trentaine, apparemment le plus haut gradé. Nous ne pouvions pas résister, contre ces grands hommes armés d’arcs et d’épées, et nous les suivions donc, abandonnant notre “maison”, sortant à leur suite dans la rue étroite sans rien emporter. De toute façon, que pouvions nous emporter? La panière en osier? Le balais? Peut être les couverts rouillés… De toute façon, dans la prison où les soldats nous menaient, cela ne nous servirais à rien. Nous marchâmes un petit moment dans les rues dallées du promontoire, honteuses, tête baissée, tentant d’éviter les regards tantôt dédaigneux, tantôt compatissants des gens qui croisaient notre étrange cortège. Vous savez, au Promontoire, les gens sont divisés en plusieurs catégories. Ceux qui restent au Promontoire pour travailler, devenir commerçants, ceux qui s’engagent dans les Séraphins, et les autres: les voyageurs, les aventuriers. Certains partent de chez eux, d’autres quittent leur travail, d’autres n’ont pas vraiment le choix… Et comme vous le savez sûrement, ils s’entraînent auprès d’instructeurs qui leur apprennent les bases d’un style de combat ou de magie. Les Professions: Les Nécromanciens, mages de la mort, les Ingénieurs, à la technologie destructrice, les Gardiens, protecteurs et soigneurs, les Guerriers, maîtres d’armes, les Elémentalistes, disposant des éléments à leur guise, les Rôdeurs, maîtres de l’arc et de la nature, les Envouteurs, maîtres de l’illusion, et les voleurs, assassins des ombres. Au Promontoire Divin, ces gens font partie de l’économie et il y a autant de voyageurs que de résidents. Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours voulu m’en aller, partir loin, vivre de moi même hors de cette gigantesque ville qui était pour moi une prison. Mais pour l’heure, j’en était plutôt loin, de mon rêve, encadrée par quatre Séraphins qui nous conduisaient à la prison…Ils nous guidèrent vers les geôles, dans une petite rue sombre et peu fréquentée. Ma mère réprima un sanglot. Je tremblais de peur et ma sœur fermait les yeux… Mais les soldats continuèrent sans même jeter un regard à la haute grille de fer bloquant l’entrée du tunnel menant à la prison. D’une petite voix, je demandais:
“Où allons-nous?
-Contente-toi d’avancer petite.” Me répondit le grand soldat d’une voix neutre. Je continuais donc, mais me demandais où nous allions. J’avais peur, et mon imagination ne fit qu’aggraver les choses… Nous continuâmes en silence.

Sortant de la ville, nous arrivâmes dans la Vallée de la Reine, une vaste étendue de forêts, de collines et de champs qui bordait le Promontoire. C’était une région au cœur de la Kryte, jouxtant avec les Champs de Gendarran à l’Est et les Collines de Kessex au sud, qui aurai pu être un havre de paix si les centaures n’y avaient pas installé plusieurs avant postes. Ma sœur et moi découvrions cette région pour la première fois, puisqu’il était fortement déconseillé de s’y balader sans armes, notamment à cause des centaures arpentant la région, mais aussi à cause des différents monstres et créatures habitant les lieux, qui ne demandaient rien de mieux qu’un humain sans défense à croquer. Nous regardions donc avec de grands yeux avides de nature et d’air frais les alentours, oubliant soudainement les peurs qui nous tenaillaient pour contempler ces scènes banales pour les Séraphins, mais pourtant incroyables pour nous. Tous ces cerfs, daims, moas étaient libres, gambadaient à leur guise dans les bois touffus et nous envions grandement leur liberté. Tenant à distance les hostiles avec leurs armes, pour le moins dissuasives, les Séraphins nous guidèrent à travers champs et forêts vers le sud-est, et nous arrivâmes à un camp militaire. L’angoisse s’insinua une fois de plus en nous, telle une vipère sournoise et silencieuse ayant attendu dans l’ombre le moment de ressurgir. Le soldat qui cheminait en tête nous arrêta à une dizaine de mètres du camp, et un autre, en armure cabossée et rayée arriva, nous jeta un regard intrigué, et se mit à parler à voix basse avec celui qui avait mené notre expédition. Après un court échange, les Séraphins qui nous avaient escorté repartirent en nous adressant un bref salut, nous laissant avec l’homme à l’armure cabossée. Une foule de questions se bousculaient dans mon esprit, se marchant les unes sur les autres: Pourquoi nous avaient-ils mené ici? Qu’allaient-ils faire de nous? Allons nous être esclaves? Mais quelque chose me disait que j’allais avoir la réponse bien assez tôt…

" En temps normal, les gens comme vous vont en prison pour y travailler… Mais bon, on ne choisit pas d’être pauvre… Et en plus, avec cette guerre contre les Centaures, nous avons besoin d’aide dans les camps militaires, plus que jamais. Donc je vous donne le choix: vous nous aidez au camp, dans les écuries, et tout le reste, et en retour vous serez logées, nourries convenablement, habillées… Si cela ne vous convient pas, libre a vous de retraverser la Vallée de la Reine, et de rentrer chez vous si vous y arrivez… Jusqu’à ce que d’autres plus attachés aux lois viennent vous jeter dans les geôles du Promontoire…"
Sa voix se voulait calme et rassurante, mais l’on percevait l’autorité d’un meneur dans son l’intonation. Même si l’on n’avait pas vraiment le choix, nous étions soulagées, et commencions à envisager, sans rêver cette fois ci, une vie meilleure. Ma mère n’hésita pas un seul instant:
“Nous vous suivons monseigneur! Mille mercis!
-Appelez moi commandant” fit-il avant de nous entraîner dans le camp.

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Croc de Loup.8215

J’étais partagée entre l’anxiété et la joie: nous allons, si le commandant ( dont j’apprenais le nom, Cabrière, un peu plus tard ) tenait ses promesses, enfin pouvoir manger à notre faim pour la première fois depuis la mort de notre père, il y a six ans. Néanmoins, les choses pouvaient facilement devenir bien plus compliquées, si les soldats étaient mal lunés ou si le camp se faisait raser par les centaures du clan Tamini, qui attaquaient sans relâche les humains du Promontoire. Car après l’exil des Hommes d’Ascalonniens, il y a quelques dizaines années, les survivants de la terrible guerre qui les avait opposé aux hommes-loups, les Charrs et qui avait précipité la chute de la ville d’Ascalon, s’étaient réfugiés en Kryte où ils avaient bâti une gigantesque châtellerie, le Promontoire Divin. Mais pour cela ils avaient dû chasser les centaures qui s’y trouvaient, déclenchant un autre conflit qui durait encore aujourd’hui. Les Centaures, auparavant divisés en plusieurs clans rivaux, les Taminis, les Harathis et les Modniirs, ce sont alliés pour faire face aux humains, commandés par Ulgoth le Modniir dans les Hinterlands Harathis.

Le Commandant nous mena tout d’abord à une petite tente blanche, juste à gauche de l’entrée, où il nous intima d’attendre, avant de sortir et de nous laisser seules. À travers la fente entre les deux pans de tissu formant l’entrée de la tente, j’observais le camp. La première chose qui me sauta aux yeux fut le contraste entre la partie ouest et la partie est de l’avant poste: à gauche, se trouvait l’infirmerie de campagne, une seule grande tente de vingt mètres de long sur environ dix de large, au dessus de laquelle se dressait un pavillon blanc orné d’une croix rouge. De ce que je voyais de l’intérieur, des lits étaient alignés, et des soldats se reposaient, allongés dans des draps plus ou moins tachés de sang. Des infirmiers et des Gardiens passaient de patient en patient, donnant tel ou tel breuvage, vérifiant les bandages et incantant des sorts de soin. De l’autre côté, les loges des soldats, disposés autour de la hutte centrale du commandant Cabrière. L’ambiance changeait du tout au tout: des Séraphins jouaient aux cartes, partageaient une bière, ou discutaient gaiement, vêtus de leur armure dorée ruisselante gravée de runes et d’inscriptions anciennes. Ils portaient dans leur dos de larges épées enchantées, de longs arcs gravés, ainsi que des massues, des boucliers et, parfois, des fusils. Au fond du camp, quatre mannequins et quatre cibles, disposés en arcs de cercle, formaient la zone d’entraînement où plusieurs guerriers répétaient inlassablement les mêmes enchaînements. À mes yeux, tous ces hommes étaient invincibles, et je ne voyais pas comment une autre armée pouvait les mettre en échec et les envoyer à l’est du campement. Mais quelque chose sur le camp captiva mon attention: un entremêlement complexe de cordes et de planches de bois, dont le sommet montait à plus de six mètres de haut. Cet axe central reposait sur une base circulaire large de deux mètre. Une autre barre de bois semblait fixée par son milieu à la barre principale, et à l’un de ses extrémités, suspendue au dessus du sol, pendait un bloc de pierre rectangulaire taillé flanqué de bois. De l’autre, une sorte de panier géant dans lequel on avait posé une énorme pierre ronde et lisse. J’écarquillais les yeux devant la majesté de cet appareil qui m’était totalement inconnu, mais qui me subjugait par sa taille et sa complexité apparente. Je me tournais vers ma mère et lui demandais quelle était cette étrange machine. À ce moment là, le Commandant fit irruption dans la pièce, et ce fut lui qui m’expliqua:
“Ça s’appelle un trébuchet. On s’en sert pour lancer des rochers sur les centaures. On peut envoyer le roc jusque derrière la montagne, là-bas. Me dit-il en pointant du doigt une petite montagne.
-Waouh!” Répondis-je, impressionnée.
Cabrière portait avec lui une pile de vêtements simples en coton blanc et or, des sous-vêtements, ainsi que trois petites sacoches. Il les tendis à ma mère:
“Mettez ça. Il y a deux tenues pour chacune. Jetez ensuite vos haillons au feu, là bas. Je vous attends dehors”.
Sur ce il ressortit sans nous laisser le temps de dire quoi que ce soit. Après avoir fermé la tente pour ne pas être vues de l’extérieur, nous enfilâmes nos nouvelles tenues. La tunique semblait taillée sur mesure et me tombais parfaitement: elle descendais jusqu’aux chevilles, ses longues manches se retroussaient au bout, et était bien plus confortable que tout ce que j’avais porté jusqu’à ce jour. Je me débarassais sans regret, et même avec un certain plaisir, de mes vieux haillons. J’enfilais les petites sandales de cuir marron, et sortais à la suite de ma mère et ma soeur sous le regard curieux des soldats…

Trahearne l’interrompit:
"Vous me parlez de votre soeur et de votre mère… Mais vous ne m’avez rien dit à leur sujet…
-Je ne le jugeait pas utile… Et puis… Je préfère ne plus y penser. Mais si vous insistez…

Ma soeur avait douze ans, et me ressemblait plus ou moins. Elle avait la peau plus mate que moi, mais à part cela, nous nous ressemblions en tous points. Nous nous parlions aussi très peu, car elle ne bavardait pas, et moi non plus. De plus la misère dans laquelle nous vivions ne laissait pas la place aux longs dialogues. Elle se nommait Laïane. Ma mère, ni trop grande, ni trop petite, ni moche ni belle, était une femme banale, mais elle représentait tout pour nous: brune, les levres fines et gercées, Après être sorties, nous retrouvâmes le commandant, qui nous demanda de le suivre. Il assigna ma soeur aux écuries, ma mère au lavage des armures et moi, à l’archerie. J’étais chargée de réparer et d’assembler les dizaines de flèches qui étaient tirées chaque jour, au combat où à l’entraînement. Je fabriquais aussi de temps à autre les cibles d’entraînement, peignant les rouleaux de jute de trois cercles concentriques. Même si les jours au camp se ressemblaient tous plus ou moins, la vie était simple et facile comparée à la vie en ville. Comme quand on bouge un poisson d’un bocal en verre à une baignoire, nous sentions libres entre ces épais remparts de bois en plein milieu des horreurs de la guerre. Nous mangions toutes les trois dans notre tente, à notre faim, et malgré les longues journées de travail, les blessés et estropiés qui hurlaient de douleur quasiment tout le temps, nous nous sentîmes mieux au camp que chez nous. Au fil des années, nous conaissions de mieux en mieux les soldats, et nous discutions parfois le soir avec certains d’entre eux. Nous recevions parfois des cadeaux à Hivernel où à notre anniversaire, des biens de moindre valeur que je n’avais jamais imaginé posseder un jour: un paquet de cartes, une paire de boucles d’oreille en quartz et en bronze, une broche à cheveux et même un cerf-volant que Cabrière nous ramena un jour du Promontoire. Ma soeur rendait les chevaux impeccables et les cavaliers se bousculaient pour lui confier leur monture, et moi, je me débrouillais pour rendre chaque flèche plus aiguisée et équilibrée. L’un des archers, un grand gaillard chauve un peu bourru, m’avais dit un matin en rigolant et en me mettant une tape sur l’épaule qui manqua de me mettre à terre:
“Si toutes les flèches de l’armée perçaient les armures comme les tiennes, ça f’rait longtemps qu’on aurai fait des brochettes de ces centaures!”
Quand à ma mère… disons que cela faisait longtemps…depuis son mari. Et puis c’était aussi la seule femme du campement, ce qui expliquait peut être pourquoi elle passait quasiment toutes les nuits hors de notre tente. Au début, ces pratiques nous révoltaient, ma soeur et moi, mais nous avions fini par l’accepté à force d’habitude et d’auto-conviction… Et puis comme le répétaient inlassablement les hommes, histoire de se sentir encore moins légitime: “ma femme n’es pas obligée de savoir” ou encore “Bah! Elle doit etre entrain de… Ouai non, laisse tomber petite…” Un jour, l’un des archers du camp, Eileen, me proposa d’apprendre à manier l’arc. J’acceptais avec un grand sourire, le remerciant mille fois. Depuis notre arrivée au camp, il y a maintenant deux ans, je me contentais d’observer les tireurs depuis le petit établi où je fabriquais les flèches et les cibles. J’avais tant étudié leur position, que j’étais sûr de pouvoir la reproduire. Je me levais et me dirigeais vers celui qui, plus tard, deviendrait mon mentor. Eileen, considéré comme le meilleur tireur du camp, impressionait non seulement par sa précision, mais aussi par sa vitesse de tir et son calme lors des situations les plus délicates. Grand et mince, il n’était pas musclé comme les autres soldats, mais cela ne le rendait pas moins redoutable, car il compensait par son agilité et ses réflexes. Le regard vif, les cheveux longs attachés en queue de cheval, il vous transperçait à chaque coup d’oeil, aussi bref soit-il, et à chaque flèche, aussi loin soit-il.

Au début il me fit signe de ne pas bouger et d’observer, après quoi il se mit de profil, torse bombé, arc à la main, banda la corde et tira. Le tir du professionnel désabusé qui décochais peut-être la millième pointe de sa carrière, et la flèche vint, proprement, se planter juste à coté du cercle le plus petit. Puis il réitéra exactement les mêmes gestes, les ralentissant avec ostentation et en me demandant de bien mémoriser. J’acquiescais jouant l’élève assidu, mais je jubilais intérieurement, car ces mêmes mouvements, je les avais déjà appris malgré moi à force d’observer les tireurs lorsque j’assemblais les flèches. Je pris donc l’arc qu’il me tendait: un arc long Krytien, presque aussi grand que moi, plaqué de métal et gravé de courbes runiques délicates. Je m’attendais à ce qu’il pèse lourd, mais à mon grand étonnement, il n’en était rien: je pouvais le soulever d’une main sans trop d’efforts. J’attrapais une de mes flèches et, me concentrant, je tentais de reproduire au mieux les gestes d’Eileen. Après avoir visé pendant quelques secondes, je relâchais ma flèche… Qui vint se planter dans la cible au bord extérieur du cercle du milieu, dans un vibrato presque plaisant. J’étais agréablement surprise, mais mon futur mentor encore plus. Sans rien dire, il me lança une autre flèche, que j’envoyais juste à coté de la précédente, mais cette fois plus près du centre. Je passais donc l’après-midi avec Eileen, et tir après tir, les trous dans la cible se rapprochant du cercle central à mesure que le soleil descendait dans le ciel. À la fin de la journée, il me laissa seule un moment, et se dirigea en courant vers la tente du Commandant. Il y resta un petit moment, mais finit par revenir, Cabrière sur ses talons. Quand ils furent à son niveau, il s’accroupit à ma hauteur, et d’une voix calme me dit, tout simplement:
" Ça te dirai de t’entraîner au tir, plus souvent?
– Oui commandant! Avec joie!
– Tous les jours?
– Oui!"
Il se tourna vers son soldat:
-Eileen?Tu accepterais de former Iryenna?
-Avec plaisir Commandant! Elle mettra toutes ses flèches dans le mille d’ici un mois, répondit-il tout sourire.
-À ce que je vois, cela ne sera pas trop difficile… Bon apprentissage".
Je le remerciais, et lançais un regard à mon mentor. Demain à huit heure, me dit-il. J’acquisais, et après l’avoir remercié, je courais retrouver ma mère pour lui anoncer la nouvelle. Elle parut contente, et fière. Elle m’a serré dans ses bras. Pour la première fois, je pouvais envisager de sortir de la situation dans laquelle nous nous trouvions. Si je devenais soldat, j’aurai un salaire, et alors je pourrais vivre normalement quand je n’aurai plus la force de me battre. Et puis l’idée de défendre le Promontoire contre l’envahisseur ne me déplais pas: je rêvais déjà de conquêtes, de guerre, de centaures, même si cela restait pour le moment un horizon lointain, vers lequel je voguais, ou plutôt: ramais. Et c’est des arcs et des flèches plein la tête que je m’endormais ce soir là. Mon entraînement commença le lendemain, et les jours se suivirent, entre leçon de tir à l’arc, fabrication de flèches et réparations de cordes. Et bientôt je passais plus de temps au stand de tir qu’à l’atelier.

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Posted by: Croc de Loup.8215

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“Non! Pose la plante du pied sur la poutre! Tes appuis ne sont pas dynamiques! Comment veux-tu eviter des flèches en étant sur les talons?” Me hurlait Eileen alors que, perchée sur une poutre en bois montée à un mètre de la surface de la rivière, je tentais d’éviter les cerises gâtées que me balançais mon mentor, en multipliant les roues et sauts périlleux. Chaque centimètre carré de mon corps d’adolescente me hurlait d’arrêter le supplice, mais ma matière grise, elle, refusait de finir dans l’eau froide, un peu plus bas. Puis le flot de projectile cessa, et Eileen, l’air plutôt satisfait, reprit:
“Bien, exercice suivant! Reste là ou tu es.
– On peut faire une pose? Je n’en peux plus! Haletais-je.
– Parce que tu crois que ton ennemi, quel qu’il soit, te laissera des poses? Continue!”
Je décidais de ne pas protester, car je commençais à connaître mon mentor: du genre à vous casser les deux bras, et à vous dire “entraîne toi à tirer avec les bras en morceaux”. Sur ces mots, il empoigna son arc, me lança le mien, et s’éloigna d’une quinzaine de mètres. Je n’avais pas de flèches, mais lui oui: des munitions modifiées sur lesquelles j’avais remplacé la pointe d’acier par un peu de plomb enroulé de tissu. Puis il planta dans le sol une torche, qu’il alluma.
" Débrouille toi pour m’éteindre ça…"
Eileen encocha une flèche et tira, mais j’évitais son coup en me baissant prestement. L’autre tir, je le déviais avec mon arc, dansant sur la poutre, tentant d’intercepter les éclairs marrons qui fusaient autour de moi. Lorsque je parvenais à en attraper une, je la relançais sur la torche, mais j’avais beau toucher le petit flambeau à chaque coup, la flamme persistait et semblait même me narguer à chaque flèche que je tirais. L’idée de mouiller les pointes enroulées de tissu me vint alors, et je baissais vivement pour en tremper une dans le courant en dessous de moi: mais rien n’y faisait, j’avais beau humidifier mes munitions, la torche se consumait toujours de la même intensité hypnotisante. Et biensûr, Eileen finit par tomber à court de flèches et il me fit signe de descendre de mon perchoir. Avec un sourire malicieux, il me souffla:
“Le saut depuis la poutre jusqu’à la berge était trop long pour toi?
-Comment ça?
-J’ai dit que tu devais éteindre la torche, mais je ne t’ai jamais obligé de le faire à distance… Ne te complique jamais la tâche: pense toujours au moyen le plus simple, et surtout le plus sûr, d’arriver à tes fins. Allez viens, on rentre au camp, assez d’entraînement pour aujourd’hui, l’archère prodige, ramasse les flèches, on rentre au camp”

Je n’apprenais pas seulement à tirer, donc, mais aussi à garder l’équilibre, à esquiver, à décocher les flèches de plus en plus vite… Tout ça pendant deux ans. Deux ans qui passèrent bien trop vite. J’avais une passion, j’étais douée pour quelque chose. On m’avait donné un arc, je fabriquais mes propres flèches, je m’entraînais jour et nuit. Puis, un jour, ce qui devait arriver arriva…

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Posted by: Croc de Loup.8215

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Nous n’avions jamais oublié que nous étions en guerre, ma mère, ma soeur et moi. Le camp subissait parfois des attaques de Centaures, mais les soldats tenaient bon, et jamais le camp ne fut perdu. Jusqu’à l’été de notre cinquième année au camp: les Centaure effectuaient une violente percée dans les lignes humaines depuis quelques semaines déjà, et l’on rapportait d’importantes pertes partout dans la région. Tous ces évènements influaient grandement sur le moral des soldats, et l’ambiance avait changé en à peine quelques jours. Les soldats semblaient nerveux, fatigués, et ne quittaient plus leurs armures ni leurs armes, même lorsqu’ils dormaient. La menace d’une attaque de grande ampleur planait au-dessus de nous telle une gigantesque épée de damoclès. Mais tout le monde tentait tant bien que mal de continuer à faire tourner le camp, comme si de rien n’était, comme si un nuage de gaz toxique enveloppait le camp et que tout le monde faisait semblant de ne pas le remarquer. Un jour, un message venant du Promontoire arriva, ordonnant de lancer une contre-attaque sur un avant poste Tamini plus au nord afin de mettre la pression aux centaures. Après quelques heures de réflexions et de discussions très animées dans la tente du commandant, trente de nos quarante soldats partirent à l’assaut, malgré les vives protestations d’Eileen, qui tentait en vain de convaincre Cabrières d’ignorer les ordres, afin de ne pas s’exposer aux assauts Centaures. Mais au lieu de l’écouter, le Commandant l’envoya en éclaireur, ce qui signifiait clairement: “va voir derrière les lignes ennemies si j’y suis”. Et bien sûr, cela ne manqua pas. Deux heures après le départ des trois quarts de nos effectifs, la sentinelle qui montait la garde sur la partie ouest du rempart de bois qui entourait le camp hurla:
“Je crois qu’on a un problème!”
Les souvenirs que j’ai de la bataille sont flous, tout ce que je peux vous dire, c’est que le bruit des épées sortant de leur fourreau, le sifflement des flèches enflammées fondant sur le camp et les hurlements gutturaux des Centaures qui commençaient leur carnage hante toujours mes nuits, même après toutes ces années. Armées d’haches, de lances, d’épées et d’arcs, les Taminis débarquèrent dans le camp, enflammant les tentes et balayant toute résistance. Il n’y eut aucune lutte, juste des hurlements d’agonie et de terreur pendant que les enfers se déchainaient.
Aujourd’hui je me serrais jetée dans la bataille sans réfléchir. Mais ce jour là je n’était pas préparée à une telle barbarie. Je me suis cachée, dans un tonneau, pleurant pendant que les bruits extérieurs m’agressaient, chaque cri de ceux que je connaissaient depuis quatre ans s’enfonçant dans ma chair comme une dague chauffée à blanc. Soudain le monde tourna autour moi alors que la barrique dans laquelle je me recroquevillais basculait violemment et roulait sur elle-même, et je me retrouvais dans la terre, un centaure brandissant son épée au dessus de moi. Je fermais les yeux. Mais au lieu de me trancher la gorge, il m’attrappa de sa grande main griffue et poilue. Terrorisée je n’osais pas rouvrir les yeux, fermement maintenue par un animal de près de trois fois mon poids, qui me soulevais et m’amenais à bout de bras au centre du campement noyé dans les cendres et les flammes. J’entendais les cris de ma mère, qui se débattait, prise comme moi dans les griffes d’un Tamini. Ils étaient terrifiants. Leur corps de cheval, haut de près d’un mètre et demi au garrot, était brun, rayé de blanc. Ils n’avaient d’humain que le torse, poilu et incroyablement musclé. Étrangement, leur tête semblait être une chimère entre celle d’un homme et d’un cheval, penchant plus du côté de l’un ou de l’autre selon l’individu. Celui qui semblait être le chef nous fixa de ses grands yeux noirs. Puis donna un ordre à son subalterne dans une langue que je comprenais pas. Puis l’un d’eux approcha ma mère du trébuchet. L’autre me banda les yeux, et je reçus un coup dans la nuque. Je m’évanouis.

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Je reprenais mes esprits dans une position inconfortable: à genoux, jambes repliées sous moi, pieds et poings liés, attaché au cou par deux cordes tendues qui m’empêchaient de bouger la tête. Quelque chose de chaud et poisseux tombait à grosses gouttes sur ma tête, coulant dans mes longs cheveux, me donnant des frissons. J’avais toujours les yeux bandés. Le silence régnait, et seuls les craquements des flammes résonnait dans le camp. Pas de voix, de bruit de pas, seulement une odeur douceâtre de chair brûlée et de fumée. Je tentais de me libérer de mes liens… En vain. Les centaures avaient tant serré les liens que la corde, même si je n’avais pas remué, avait mit mes poignets et mes chevilles à vif. Je ne pouvais qu’attendre avec ce liquide, dont je devinais qu’il s’agissait de sang, gouttant régulièrement sur le haut de mon crâne. Écoutant le silence qui jouait une funèbre mélodie, ponctuée d’un cri humain ou centaure, au loin. Enfermée à ciel ouvert dans un noir auditif et visuel, je me posais bien des questions: Y-avait-il des survivants? Qu’allais-je faire s’il n’y en avait pas? Pourquoi m’avoir épargnée, moi, et pas un autre? Était-ce un cadavre qui se balançait au dessus de moi, me berçant de ses petits grincements à peine audibles alors qu’il semblait se balancer au bout d’une corde? Puis, un moment plus tard, je ne saurais dire exactement combien de temps, j’entendis des bruits de pas se rapprocher. Je relevais la tête, comme si je pouvais y voir quelque chose. Le bruit s’accéléra, l’inconnu se mettant à courir. J’entendis sa voix:
“Iryenna? N’aie pas peur. C’est Eileen. Ne remue pas trop, je viens te détacher.”
Il s’approcha, puis il y eut un bruit de couteau, et mes liens se détendirent brusquement les uns après les autres. Je secouais mes membres engourdis, mais quand Eileen m’enleva le bandeau que j’avais sur les yeux, je me figeais: Du camp il ne restait que des cadavres noircis, cloués au sol par une lance, une épée ou une flèche. Les tentes n’existaient plus, et l’atelier de chasseur où je fabriquais jadis mes flèches avait entièrement brûlé. En levant les yeux je découvrais le cadavre de ma mère, nu, pendu par les pieds juste au dessus de moi. Éventrée, le contenu de son ventre gisait au sol à mes côtés, et du sang s’écoulait de la plaie béante, passant sur son front où une étrange inscription avait été peinte, puis gouttant sur mon front. Je m’éloignais d’un bond de la pluie de sang, tentant d’échapper à la vision d’horreur qui venait de violer ma sensibilité, et renvoyais le contenu de mon estomac, agenouillée telle une malpropre, tremblant de tout mon corps couvert de boue et de sang. Mais peu à peu, aussi sûrement que le soleil laisse place à la lune, l’effondrement céda la place à la haine. Une haine qui nait dans les veines, qui gangrène coeur et esprit, qui vit dans les yeux… Et qui ne meurt que dans le sang des ennemis. Car ce jour là, on m’avait non seulement ôté ma mère et ma soeur dont je ne retrouverais pas le corps, mais aussi la seule situation heureuse que je n’avais jamais eue. On l’avait piétinée, tranchée, brûlée et finalement pendue au dessus de moi pour vider son sang sur ma tête. Tout ça sans que je ne puisse rien y faire. C’était trop. Je me relevais, séchant mes larmes à la chaleur de ma hargne, et me tournais vers Eileen:
“Merci. Que vas tu faire maintenant?
-Sûrement retourner au Promontoire, et me faire assigner un autre poste, me répondit-il, tu viens?
-Non, désolé…”.
Il me fixa longuement, interloqué et peit être déçu. Puis haussa les épaules:
"Mais, tu va faire quoi maintenant?
-Me débrouiller seule. Vivre libre. Merci pour ton enseignement Eileen, fis-je en m’inclinant.
" Tu as été une élève incroyable. Fais comme tu veux, je comprends ton choix. Tu as vu tes cheveux?
-Non? Pourquoi?
-Ils sont rouges sur le dessus.
-C’est le sang de ma mère… Ça partira…
-Je ne crois pas non, dit-il en pointant du doigt la rune magique sur le front de ma mère. C’est une rune de Scribe et tout liquide qui passe dessus ne décolore jamais. Très utile pour les runes et pour les enchantements.
-Alors je vais parfaire la couleur… Qui est le chef Tamini?
-Ulgoth le Modniir, dans les Hinterlands Harathis. C’est tout ce que je sais.
-Ça ira. Merci pour tout Eileen. Puisse Dwayna illuminer ton chemin.
-Attends, dit-il avant de me lancer son arc. Prends ça… Et bonne chance.
-Merci beaucoup".
Sur ce il sortit du camp sans se retourner, bifurqua à la sortie, et disparut dans les plaines. Je contemplais l’arc. Comme ça, on aurait dit un arc Krytien avec lequel j’avais l’habitude de m’entraîner. La seule différence était les deux lames effilées accrochées aux deux extrémités. Cela permettait non seulement la défense au corps à corps, mais aussi un meilleur équlibre de l’arme, bien qu’elle soit alourdie. Je ramassais un carquois, et autant de flèches que je pouvais en trouver, qu’elles soient humaines ou centaures, soit une vingtaine. Je tentais de me dénicher de nouveaux vêtements, mais tout avait brûlé, si bien que je gardais mes sandales de cuirs, ma tunique en côton blanche tachée de suie et de sang, qui était d’ailleurs plus marron et rouge que blanche. Je trouvais aussi un canif planté dans l’épaule d’un des rares Tamini tués, que j’attachais à ma ceinture. Néanmoins, il me restait une chose à faire pour définitivement enterrer mon passé douloureux. Ramassant un long morceau d’étoffe légère, je la trempais dans une flaque d’huile de cuisine qui n’avait pas brûlé, je ne sais par quel miracle. Après l’avoir enroulé autour du corps de ma mère, l’avoir couverte d’huile et avoir fait de même pour ma soeur, j’enflammais une flèche, et incinérais leurs corps. J’avais un but, de la volonté, un arc et des flèches, et aussi surprenant que cela puisse paraître, j’étais presque heureuse alors que je sortais du camp au pas de course.

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Alors que je courais dans la forêt, m’éloignant de plus en plus du campement, je me rendais compte que j’allais avoir besoin d’un certain nombre de choses essentielles… Déjà, je n’avais pas de carte et cela s’avèrerait utile pour me repérer dans la région, voire indispensable si je voulais partir loin de la Vallée de la Reine. Biensûr, je n’avais ni tente, ni sac de couchage et les nuits risquaient d’être dangereuses en plus d’être inconfortables, avec les Taminis et les autres créatures qui rôdaient dans les bois. Et, surtout, une question restait sans réponse: où allais-je pouvoir partir? Je refusais de m’interroger sur ce point, mais un jour où l’autre, il faudrait y réfléchir. Pour le moment, le soleil tombait et je ne savais pas du tout où j’allais passer la nuit. M’arrêtant pour réfléchir un instant, je tentais de me souvenir d’une direction, d’un village, que j’aurais pu entendre au camp. Tout ce que je savais c’est qu’au nord coulait une rivière où j’allais parfois m’entraîner et qu’au passage jusqu’à la région au sud de la Vallée, se dressait un petit village. Le problème, c’est qu’il pouvait se trouver aussi bien à quatre heures de marche, qu’à vingt minutes. Je n’en savais rien… De toutes façons, c’était ça où une nuit dehors avec les centaures rôdant dans les environs… Je commençais à courir vers le sud: il me fallait pour commencer nettoyer le sang sur mon visage à défaut d’enlever celui sur mes cheveux, pour ne pas ressembler à un cadavre fraîchement déterré. J’aviserais ensuite.

Par chance, je trouvais le patelin juste au moment où la nuit tombait. Il s’appelait Claypool. La plupart des habitants semblaient dormir, et les volets des maisons étaient en grande majorité clos. Seule une petite chaumière paraissait ouverte, et de la lumière s’échappait par les fenêtres mal lavées. Un petit écriteau en bois pendait au dessus de la porte d’entrée qu’une lampe à pétrole éclairait. Sans doute une hauberge ou une taverne. Je traversais le village, passant devant les ateliers de travailleur du cuir, de bijoutier, de forgeron, et devant les habitations aux toits colorés. De jour, l’endroit devait grouiller d’artisans et de marchands itinérants transitant avec les Collines de Kessex, et de clients discutant des prix et échangeant des potins. J’entrais dans l’hauberge, arc à la main, flèches dans le dos. Six tables rectangulaires, un comptoir en bois massif rongé par les mites et les coulures de bière, devant lequel étaient disposés des tabourets. L’allure de l’auberge ocsillait entre le miteux hors d’âge, qui me fixait à travers les yeux de biches et de cerfs dont les têtes accrochées au plafond semblaient presque se plaindre de la poussière qui s’accumulait sur leur nuque, et le moderne qui s’éxibait sous forme d’un espèce d’aquarium aux vitres tellement propres qu’on entendrait presque l’eau s’écouler sur le parquet d’acajou. Sans compter l’odeur de cacahuète trempée dans la bière, qui donnait sûrement aux poissons l’envie de s’enfoncer dans les graviers luisants tapissant le fond de leur grand bocal rectangulaire. Un bar dans les règles de l’art, sauf qu’il n’y avait personne à part deux hommes à la large carrure assis au bout du comptoir, discutant autour d’une chope de bière. L’un d’eux me jeta un bref regard lorsque je m’asseyais. La tavernière était une jolie blonde qui devait avoir dans les vingt-cinq ans, vêtue d’une jupe lui arrivant aux genoux et d’un tablier tâché. J’en venais à me demander pour quelle blonde venaient les deux hommes qui lançaient des regards en pensant qu’elle ne les remarquait pas. Elle passait un coup de chiffon sur l’arrière bar, et me salua d’un signe de tête lorsqu’elle me vit. Je lui demandais:
“Bonsoir, vous avez des chambres?
-Oui, simple ou double?”
Je tournais la tête vers les deux autres clients, puis répondais dans un sourire
“Simple, ça ira, combien cela me coûtera?
– Deux pièces d’argent”
J’avais réussi à en ramasser dix. Mais pour l’instant, c’est pas comme si j’avais le choix. Je posais les pièces luisantes devant la tôlière, qui m’indiqua la chambre et me lança les clés. Je montais le petit escalier de bois usé, et arrivais dans un petit coridor mal éclairé couvert d’une moquette verte olive sûrement aussi vieille que la bâtisse. J’entrais dans la pièce, éclairée par une petite lampe a pétrole. Elle contenait le minimum syndical: un lit, une armoire de bois, un lavabo, une baignoire et un miroir. Je me précipitais vers celui-ci, et me regardais dans la glace. Je m’en sortais bien: après m’être nettoyée tout à l’heure dans la rivière, ma peau avait plus ou moins retrouvé sa couleur habituelle. Par contre, mes cheveux faisaient peine à voir: crasseux, secs, ébourrifés et en cascade sur mes épaules. Tout cela irai mieux après un bain et un peu de savon. J’enlevais ma tunique et mes sous-vêtements que j’abandonnais sur le sol, versais l’eau chaude et l’eau froide contenues dans deux sauts posés dans un coin de la pièce dans la baignoire, et me glissais dedans. Tout d’un coup, il me semblait que toute la pression et la peur accumulées depuis l’attaque du camp se relâchaient. Mes muscles se décontractaient, je fermais les yeux. L’eau et la lumière dansante de la lampe m’appaisaient, et je restais un petit moment sans bouger, prenant le temps de me demander comment j’allais pouvoir m’enrichir, et mener ma nouvelle vie. Mais tant que je n’avais pas vengé ma mère et ma soeur en tuant Ulgoth le Modniir, je ne pourrais pas partir à l’aventure en paix. Revenant à la réalité, j’attrapais la savonnette posée sur le bord du lavabo en pierre grise, et commençais à enlever le sang sur ma peau. Je tentais de nettoyer mes cheveux, même si Eileen m’avais assuré que la couleur ne partirai jamais. Il avait raison: j’avais beau frotter et frotter, je n’obtenais aucun résultat. En sortant du bain, je me regardais dans le miroir. Fine, assez musclée, un peu de poitrine… Je ne devais pas être trop désagréable à regarder, à un détail près. J’attrapais un ciseau et une brosse à cheveux sur le rebord, et me mettais au travail. Après quelques minutes, je me regardais à nouveau dans la glace. J’avais coupé en long carré qui me descendait jusqu’aux seins, le front proprement couvert par une frange bien droite. Toute la partie supérieure était rouge sang, mais la couleur s’estompait au niveau du menton dans un dégradé brun et sang désordonné. Un cri résonna sous mes pieds nus. Je me baissais et collais mon oreille au sol. Il y avait deux voix d’hommes, et la voix de la tavernière:
" Sortez de mon bar!
– Allez, viens, on va s’amuser tu va voir! Fit la première voix d’homme.
– T’as pas envie de prendre un peu de plaisir? Tu n’as même pas de mari, faut bien se détendre un peu non? Enchaîna la deuxième
– Je vous ai déjà dit non! Maintenant dégagez! Hurla la jeune femme.
– Si il faut te forcer…"
Je n’attendis pas la suite, j’avais déjà compris ce qui allait se passer. J’enfilais mes sous-vêtements à la hâte, prenais mon arc et mon carquois que je mis en bandoulière, et je sortais en trombe de ma chambre pendant que la tôlière hurlait. Je m’arrêtais en haut de l’escalier. Le plus fort des deux hommes tenait la femme par les poignets, et tentait de l’amener vers les chambres à l’étage. J’encochais rapidement une flèche et tirais.

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En une fraction de seconde, le projectile vint se planter sur le mur de bois, bien en vue du grand gaillard qui maintenait fermement la tavernière. Plus personne ne bougea. Puis les deux hommes se retournèrent de concert. J’ordonnais d’une voix claire et forte:
“Lâche la!”
Il éclata d’un rire sincère, ainsi que son comparse, pleurant presque, se tordant en deux. Ce qu’avec du recul, je peux comprendre à présent… Ce type s’apprêtait à violer une jolie blonde de vingt-cinq ans, et là, une gamine de seize ans plutôt bien fichue se pointait, en sous-vêtements, arc à la main, et lui ordonnait d’une voix impérieuse d’arrêter… J’aurais peut-être réagi de la même façon. Mais, ce soir là, je n’était pas d’humeur à rire, et je répétais en dégainant une autre flèche, articulant bien:
“Lâche-là!
-Tu vas me tuer? Je t’en prie, tire, si tu veux finir pendue sur la place du village dans les jours qui suivent…
-Je n’aurai pas besoin. Maintenant lâche là immédiatement, où je t’embroche.
-Mademoiselle donne des ordres! Fit -il d’un ton sarcastique en décrivant de grands gestes avec ostentation. On va…”
La flèche se planta dans son épaule droite. Il ne finit pas sa phrase, tomba au sol, hurlant de douleur. J’esquissais un sourire. Quel minable… J’avais vu des soldats continuer à combattre avec une pointe dans chaque épaule, et avec le sourire en plus. Le temps que son acolyte se saisisse de son couteau, je l’avais déjà en ligne de mire. De lui même, il lâcha l’arme, et leva les mains. J’ordonnais:
“À genoux!”
Il s’éxécuta. J’hésitais à lui demander d’embrasser les pieds de la tavernière, et les miens, par la même occasion, mais je crois que je ne tenais pas à avoir les orteils qui sentent l’alcool et la cigarette alors sue je sortais à peine du bain. Et puis je n’était pas si cruelle. Je jetais un coup d’oeil à son copain, livide, hurlant de douleur et pissant le sang. Je vous avoue que j’ai hésité à le laisser comme ça… Mais j’imagine que j’ai bon fond après tout, c’est pourquoi, tout en le gardant en joue, j’intimais à l’autre de déguerpir, ce qu’il fit sans demander son reste, s’élançant dans la nuit en claquant la porte du bar. Après ça, je me dirigeais vers celui qui avait la flèche dans l’épaule, à présent roulé sur lui même, du sang s’écoulant abondement de sa blessure. Je lui dis:
“Sur le dos. Bouges pas, et je te retire cette flèche.
-papillone!
-Comme tu veux”.
Je posais le pied sur ses omoplates, puis, à deux mains, je tirais sur la flèche d’un seul coup. La hampe sortit de l’épaule, arrachant au passage un petit morceau de chair. Il hurla de plus belle, ce qui me fit presque plaisir. Balançant l’arme par dessus mon épaule, j’attrapais une serviette propre sur la table la plus proche, et la nouait autour de la blessure pour éviter qu’il ne se vide de son sang. Il ne bougeait plus. Toujours le pied sur son dos je lui dit d’une voix calme et froide:
“Bien, maintenant tu vas t’excuser auprès de madame…
-Pardon madame… Gémit-il
-Et qu’est-ce qu’on dit pour la flèche?
-Merci…
-Merci qui?
-Merci mademoiselle
-Très bien! ( je relâchais mon emprise ) Dégage”.
Il se leva et s’enfuit du bar en claudiquant. Je me tournais vers la tavernière, qui s’était réfugiée derrière le bar lorsque j’avais tiré la première flèche. Elle tremblait. Je posais mon arc sur une table ainsi que mon carquois. Elle se releva et s’inclina très légèrement:
“Merci, merci beaucoup…
-Je ne pouvais pas les laisser faire, et puis… Ce fut un plaisir.
-Reste ici autant que tu voudras, la chambre est à toi. C’est pas comme si nous étions pleins en se moment…
-Ça m’arrange bien. Merci à vous.
-Appelle moi Mathilde.
-Iryenna, ravie de te connaître, tu m’excuseras, je vais finir ma nuit. Tu peux dormir tranquille, ces deux là ne remettront jamais les pieds ici… Fit-je dans un bâillement
-Pas de problème, je t’apporterais le petit déjeuner devant la porte vers neuf heures trois-quarts. Bonne nuit.
-Merci”.
Sur ce je récupérais mon arc, mon carquois, ainsi que la flèche plantée au mur et celle, ensanglantée que j’avais retiré à l’instant et remontais dans ma chambre. En y réfléchissant bien, je me disais que la soirée n’aurait pas pu être plus productive: je savais maintenant où me loger le temps d’amasser un peu d’argent pour subvenir à mes besoins et c’était un problème en moins. Je posais mon arc (et mon carquois) au pied de mon lit, et m’allongeais. Je me rendais alors compte que j’étais harassée. Je m’endormis avant même que ma tête touche l’oreiller. Cette nuit là je rêvais de ce moment, où je voyais ma mère à la merci du centaure qui l’emmenait vers le grand trébuchet. Sauf que cette fois, ma mère hurlait:
“Prenez ma fille! Laissez moi la vie!”
Je me réveillais subitement, étrangement transie de froid, mais je me rendormais presque aussitôt.

Trahearne interrompit le récit de la jeune rôdeuse en levant la main. Cela faisait plus d’une heure qu’Iryenna racontait son histoire, et l’attention du commandant. Néanmoins il n’était pas à l’aise sur le dur fauteuil de son bureau, sans parler de la jeune femme, assise sur une simple chaise de bois, inconfortable au possible. Évidemment, elle n’osait pas s’en plaindre au chef du Pacte. Il lui dit gentimment:
“Venez mademoiselle, je peux nous offrir un meilleur siège. Si vous voulez bien me suivre.
-Je veux bien, merci, répondit-elle dans un sourire”
Le Sylvaris l’entraîna dans une salle adjacente. Il entra le premier, et lui tint la porte. Elle le remercia. Apparement, elle avait gagné son respect grâce à son récit, la froideur militaire ayant laissé place à une ambiance plus détendue…. Et le meilleur restait à venir. La salle dans laquelle ils se trouvaient maintenant était nettement plus exiguë que la précédente. Un autre feu brûlait dans une cheminée plus étroite. Au centre de la pièce, juste devant le foyer, deux énormes fauteuils de cuir, chacun d’un côté d’une petite table basse carrée en bois laqué. Le sol doux tapissé de moquette bordeaux donnait un peu de couleur à la pièce. Globalement très cosy, la lumière tamisée émise par le petit feu invitait à la discussion et à la détente. Il invita la rôdeuse à s’asseoir, et ouvrit un petit placard où une dizaine de bouteilles s’alignaient comme autant de petits soldats en rang serré. Il proposa une boisson à son invitée qui refusa poliment, et lui-même se servit un peu de vin dans un verre de cristal parfaitement transparent extrêmement fin, puis prit place en face d’elle.
-Continuez, je vous en prie, lui dit-il en souriant.
-Bien, donc comme je le disais…

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Je me réveillais le lendemain, reposée et ressourcée malgré mon mauvais rêve. La petite pendule indiquait dix heures. Mon corps me hurlait de rester au lit, mais je refusais de rester oisive alors que j’avais tant à faire, et après m’être levée et habillée avec ma tunique sale encore tachée de sang, j’ouvrais la porte et prenais le petit plateau déposé sur le sol un peu plus tôt. Mathilde y avait déposé deux énormes morceaux de pain grillés, du miel, du beurre frais, une théière remplie d’eau bouillante, et un infuseur. Je m’apprêtais à rentrer dans ma chambre avec mon petit-déjeuner, quand la tavernière arriva en haut de l’escalier. Je la saluais:
“Salut!
– Bonjour! Tout s’est bien passé?
– Oui, parfaitement bien.
– Viens manger tout ça au comptoir avec moi, me proposa t-elle en désignant le plateau.
– Je ne te gênerais pas?
– Non, il n’y a personne en bas. C’est trop tôt, et puis ça me fera de la compagnie.
– Alors c’est avec plaisir, merci”. J’enfilais mes sandales, et descendait à sa suite. Elle retourna derrière son comptoir, et je m’asseyais à la même place que la veille. Je commençais à infuser de mon thé tout en observant la salle. Le sang sur le parquet avait été nettoyé, et il n’y avait aucune trace de l’altercation d’hier. Je commençais à tartiner mon miel, quand Mathilde entama la conversation:
“Encore merci pour hier”
Je lui répondait, tout sourire:
“Tu comptes me remercier encore combien de fois?
-Je sais pas, tant que j’estimerai que je ne t’ai pas assez remercié, répondit-elle en riant.
-Alors considère que c’est bon
-Ah! D’accord. Tu as quel âge pour traîner seule dans les tavernes?
-Seize ans, et toi?
-Vingt-trois. Comment se fait-il que tu sois seule comme ça?
-C’est une longue histoire…
-Ah… Désolé.
-Pas de problème. J’ai besoin d’argent… Il n’y aurait pas une chasse organisée ces jours-ci?”
En Tyrie, les chasses étaient des attaques ou des battues organisées par toutes sortes de combattants pour éliminer un monstre particulièrement gros ou puissant. Une prime étaient donnée à tous les participants, et ces derniers avaient le droit de prélever un trophée si la bête était tuée. Mais vous deviez déjà le savoir…
“Je crois qu’aujourd’hui, une petite équipe va s’occuper de la reine guêpe, et par la même occasion, du sanglier géant qui rôde dans les bois.
-À quelle heure?
-Le rendez-vous est donné la scierie d’Ojon, plus au nord, à quatorze heures. Tiens, prends cette carte. Me dit-elle en sortant un papier roulé de derrière le comptoir.
-Merci, j’irai”.
J’avais englouti mes tartines et bu mon thé sans même m’en rendre compte. Je laissais Mathilde prendre le plateau, et je remontais dans ma chambre attrapper mon arc. Si le rendez-vous des chasseurs était à deux-heures, ce qui m’en laissait trois pour me préparer à la chasse. Soit trois heures pour m’équiper en armures, avec huit pièces d’argent de budget, en tout et pour tout. Je commençais par sortir sur la place principale de Claypool: je n’allais pas me trimbaler en sandales et tunique de coton pendant une chasse, il me fallait une armure. La grande place grouillait de monde, et, étrangement, les gens ne semblèrent pas s’étonner de ma tenue tachée d’hémoglobine: à vrai dire, certains se baladaient accompagnés d’élémentaires de bonbons miniatures qui les suivaient de leur démarche trébuchante, et d’autres, pourtant vêtus d’armes et d’armures que seuls les guerriers renommés peuvent s’offrir, arboraient des sacs à dos en peluche bleue ou orange représentant des charrs ou des Quaggans. Alors je pouvais me trimbaler en tunique blanche plus rouge que blanche, qui s’en apercevrait? Des hommes travaillaient sur les établis de métier mis à leur disposition, confectionnant des armes et des armures de toutes sortes, martelant le fer, le platine ou l’orichalque en samples ré bémol qui sonnaient clair dans l’air du matin. Un grand homme bien bâti couvert d’une armure métallique cabossé polissait une épée longue d’un mètre et demi, luisant au soleil. Un autre, un chiffon dans une main, une clé à molette dans l’autre démontait patiemment un long fusil à lunette, gravé de l’inscription “Prédateur” sur la crosse. Une dame aux cheveux noirs de jais et à la peau pâle marmonnait des incantations, penchée sur un bâton orné d’un démon sculpté à l’extrémité qui reposait sur table d’enchantement. Une sorte de brume noire s’échappait de ses mains pour venir flotter au dessus de l’arme comme un orage invoqué chargé de magie complexe. Elle portait une magnifique robe noire et lisse, ne laissant apparaître que ses épaules, s’arrêtant juste au niveau du sol: sûrement une tenue de comtesse… Une sorte de collant lui couvrait le bas des épaules jusqu’à ses mains. Seul l’intérieur de ses bras, ses gants, et son buste étaient colorés de bleu givre. Une idée vint peu à peu me titiller l’esprit: je me dirigeais vers elle et lorsque j’arrivais à sa hauteur, elle leva les yeux vers moi. Je m’incinais avec humilité:
“Madame?
-Bonjour petite, que veux tu?”
Même si me faire appeller “petite” ne déclencha pas chez moi que du plaisir, je continuais:
-J’aimerais savoir si vous pouviez enchanter mon arc, je ne sais pas le faire, s’il vous plaît".
Elle me considéra d’un oeil amusé, puis jeta un regard à mon arc.
– Eh bien… Si gentimment demandé… J’imagine que je ne peux pas refuser… Quel enchantement veux tu?
– Berserker! Merci madame!"
Je lui tendais mon arc, reculais d’un pas, laissant celle qui semblait être une nécromancienne travailler. L’enchantement berserker, comme vous le savez, permet une meilleure puissance dans le tir et une bien meilleure précision. Tous les archers un peu sérieux le possédaient et je ne comptait pas faire exception à la règle. Enchanter ne coûtais rien, sinon des connaissances, un peu de temps et de la concentration, et la dame était bien aimable de me rendre ce service. Une fois son oeuvre terminée, elle me rendait l’arme, et je la remerciais en souriant. Après cela, je me dirigeais vers le forgeron d’armures. Mais ce charlatan vendait ses articles bien trop cher, et il était hors de question que je paye cinq pièces d’argent pour une pauvre tenue en cuir, me couvrant uniquement le torse. J’allais encore devoir demander de l’aide à quelqu’un…

Deux heures plus tard, j’avais dépensé mes huit pièces d’argent restantes, mais j’avais réussi à m’équiper complètement: bottes de cuir, pantalon, manteau de fauconnier orné de plumes, léger et résistant, et gants de cuir, le tout couleur cendre et rouge. Entre petits coups de main aux marchands et travailleurs du cuir, générosité et négociations, j’avais réussi à me procurer une armure complète, d’une assez bonne qualité. Car en Tyrie, les nombreuses guerres avaient soudé les aventuriers, et ils n’hésitaient pas à aider les combattants moins expérimentés ou moins riches qu’eux, pour peu que l’on demande gentiment, puisque chaque nouveau guerrier augmentait les chances de victoire lors des combats. Certaines guildes mettaient même un point d’honneur à guider et former les nouveaux venus sur les routes de Tyrie. Satisfaite, je pouvais commencer les choses sérieuses. Je sortais de Claypool, et prenais la direction de la scierie d’Ojon, arc à la main.

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À en croire la carte, le point de rendez-vous n’était pas très loin du village. Seulement trois-quarts d’heure de marche. Le problème, c’est que la Vallée de la Reine n’était pas une region complètement sûre. Bandits, ou créatures agressives que je dérangeais sur leur territoire n’hésitaient pas à m’agresser à grand renfort de griffes, crocs, arcs, pistolets ou fusils, mais je n’eus que deux ou trois gros accrochages et globalement le trajet fut rapide et facile. Quand j’arrivais à destination, une dizaine de personnes étaient déjà là. Je les saluais d’un signe de tête, et il me rendirent mon salut. Il y avait un Gardien, barricadé derrière son armure de plaques lourde, armé d’un bouclier et d’une masse; une envoûteuse masquée en armure complexe, enchevêtrement d’étoffes violettes armée d’un grand espadon de fer; un étrange homme portant un bandana devant la bouche et une blouse de cuir noire de jais qui jouait avec ses deux pistolets; un sylvari assis en tailleur, s’occupant nonchalamment avec une boule de feu qu’il s’amusait à faire voler à droite et à gauche. Sûrement un élémentaliste. Il y avait aussi plusieurs chasseurs, plus simplement vêtus et armés: blousons cloutés et fusils de chasse. Au bout d’un petit moment, l’un des chasseurs fit signe de le suivre. Le petit convoi se mit en marche et en se protégeant mutuellement des attaques de monstres, nous traversâmes la forêt de hêtres et de chênes, jusqu’à arriver à un petit tas de cadavres sauvagement déchiquetés. Une vache, un loup et même un homme. Ignorant l’horreur de cette vision, nous nous préparâmes à affronter la Reine Guêpe car selon les chasseurs, nous étions pile sur son garde-manger. Un bourdonnement assourdissant retentit, et l’on se tourna pour affronter la bête. Les bêtes, car il y avait d’un côté l’imposante reine, mesurant près de deux mètres, et un autre insecte géant qui l’accompagnait. Le combat s’engagea: je reculais de quelques mètres, et commençais à aligner la reine. La première flèche se ficha dans son abdomen, la seconde, mieux ajustée, en plein dans son oeil. Les combattants au corps à corps occupaient les bestioles pendant que les archers et tireurs les criblaient de flèches et de balles. C’était ma première vraie bataille, et cela m’éxcitait tant que je ne vis pas le second insecte jallir derrière moi. Je ne percutais qu’au dernier moment, et eu juste le temps de me baisser vivement pour esquiver les mandibules chitineuses dégoulinantes de la guêpe. Je me relevais, décochais une flèche à bout portant, envoyant valdinguer mon adversaire. Soudain, le gardien surgit de nulle par et se dressa entre la créature et moi, m’adressant un sourire entendu. J’acquisais et reculais, laissant mon allié prendre le relais, et pendant que j’attrapais une nouvelle flèche dans mon carquois, une projection ardente vint frapper le soldat guêpe sur le flanc. Il y eut un gargouillis étouffé par la déflagration et les flammes alors que le feu l’enveloppait. L’odeur nauséabonde de chair calcinée parvint jusqu’à mes narines alors que je m’apprêtais à tirer, mais l’élémentaliste me frôla agilement et la pointe de ma flèche prit feu. J’ajustais ma visée au millimètre, et relâchais. Le tir parfaitement ajusté vint se planter en plein dans la tête de l’insecte qui hurla avant de s’éffondrer. Il restait encore l’imposante reine, qui malgré les frappes et balles qu’elle subissait depuis le début de l’affrontement, ne semblait pas affecté le moins du monde. Elle plongea sur l’un des chasseurs et le jeta à terre. Puis d’un coup de mandibules tenta de lui arracher le bras, mais la manœuvre échoua grâce à l’agilité et la vivacité de l’homme qui roula sur le côté et esquiva l’attaque tandis que les autres repoussaient la créature. Cette dernière, folle de rage, fonça droit sur l’élémentaliste qui préparait un sortilège. Même s’il avait vu la guêpe arriver, il ne cilla pas, attendit le tout dernier moment pour dresser un énorme pieux de pierre entre l’assaillante et lui, sur lequel elle s’écrasa lourdement. Désarçonnée, la reine s’immobilisa en vol pendant quelques secondes, et c’est ce moment que je choisis pour passer à l’offensive. Me précipitant sur elle, je lâchais mon arc et dégainais mon canif, dans une manœuvre que je qualifierais maintenant de stupide: je sautais sur le dos de la bête, et plantais mon couteau des dizaines de fois dans sa nuque. S’agitant furieusement, elle tenta de me faire lâcher prise, mais je tint bon, continuant à lui taillader le cou inlassablement. Mais subitement la reine guêpe se jeta sur le dos, m’écrasant sur le sol. Le choc me coupa le souffle et je me retrouvais sur le dos, impuissante lorsqu’elle bondit et me planqua au sol. Il y eut une brusque bourrasque d’air, qui nous envoya valser toutes deux, et nous sépara. L’élémentaliste termina son oeuvre: solidement campé devant la guêpe qui se relevait lentement, il fit jaillir un puissant cône de flamme de sa dague, carbonisant à bout portant la bête qui s’éffondra, encore fumante. Je me relevais péniblement, titubant, mais fière. Un des chasseurs me lança mon arc, je l’attrapais et regardais autour de moi: l’herbe où l’on s’était battu était carbonisée par endroits, et du sang avait giclé un peu partout. L’envoûteuse gisait au sol, du sang coulant sous elle. Mais le gardien s’occupait déjà de la blessée et la soignait grâce à plusieurs sortilèges, aidé par l’élémentaliste qui nettoyait la blessure avec de l’eau. Elle fut bientôt sur pieds, mais l’un des chasseurs n’eut pas cette chance: il gisait, éventré au milieu du champ de bataille. Nous dépeçâmes les cadavres afin de récupérer griffes, sacs de venin, et tout ce qui pourrait avoir de la valeur et repartîmes, trop fatigués pour chasser le grand sanglier, qui ferait l’objet d’une autre expédition. Arrivés à la scierie d’Ojon, le chef de l’expédition nous distribua la récompense: j’obtenais cinquante pièces d’argent, et quinze de marchandises de valeur. Ce soir là, dans mon lit, j’avais enfin la réponse à la question que je me posais depuis que j’avais quitté le camp. Maintenant, cela me semblait évident: je combattrai les plus grands monstres de Tyrie, voyageant où bon me semblerait. Lors de mes années au camp, les récits d’aventures aux quatre coins du monde avait bercé mes nuits et réchauffé mes soirées, et mon esprit voguait à l’époque de la Jungle de Maguuma au Plaines d’Ashford, des Chutes de la Canopée au Détroit des Gorges Glacées, jusqu’à l’enfer paradisiaque de la Crique du Sud-Soleil. Je voulais voir, aprendre, entendre et combattre tout ce que pouvait m’offrir le monde. Puis quand je serais trop agée, si je survis jusque là, je me poserais dans un endroit tranquille, racontant mes cicatrices à qui voudrait bien l’entendre. La seconde nuit de ma vie fut elle aussi agitée de rêves, mais cette fois ces rêves étaient doux, agréables, et je réveillais le lendemain, prête à en découdre avec le monde entier s’il le fallait pour tracer ma route.

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Je restais environ une semaine à Claypool. Je dormais à l’auberge de Mathilde, l’aidant parfois lorsque la taverne était pleine, réglant les petits problèmes de clients belliqueux, puis je partais le matin pour les chasses et effectuer d’autres petits travaux à bénéfices. Car outre les combats de groupe, j’aidais les habitants de différentes manières, et cela me rapportait quelques pièces supplémentaires, qui me permettaient d’acheter des flèches et de la nourriture, mais j’en gardais une grosse partie pour plus tard. Le danger, omniprésent, ne faisait qu’attiser ma soif d’aventures et de batailles. Plus je prenais de risques, plus je me sentais vivante, et je n’étais pas prête à abandonner cette incroyable sensation. Un jour, je m’estimais prête à partir vers le nord pour trouver Ulgoth, et je partis donc, faisant mes adieux à Mathilde, la prévenant que je ne reviendrais sans doute pas. Soit parce que je serais morte, soit parce que je serais partie loin de la Vallée. Nous fîmes nos adieux un matin, et à la lueur de l’aube, je prenais la route. Il me fallut un peu moins de quatre jours pour arriver à destination, dormant dans les villes et villages quand je le pouvais, et parfois même dans les camps militaires qui me fournissaient un lit avec plaisir. Ce fut un choc lorsque j’arrivais: je m’étais toujours imaginé les Hinterlands Harathis comme une sorte de Vallée de la Reine plus montagneuse, et sous le contrôle des centaures. Je m’imaginais les forêts de chênes et de hêtres les montagnes à l’horizon, les plaines et les ruisseaux… Et les camps Centaures. Mais je ne trouvais qu’une succession de collines et de plaines arides, nues, ponctuées de ruines, de camps centaures et humains et de cratères d’obus ou de munitions de trébuchet. Et les camps Centaures… À l’abri sous un grand rocher dans le sud de la région, je consultais ma carte: le camp où siègeait Ulgoth se trouvait à l’extrême nord, adossé aux montagnes. Outre la distance qui me séparait du seigneur de guerre, il y avait aussi les remparts et miradors qui entouraient et verrouillaient le périmètre. Le camp où il était retranché, situé dans la Gorge des Modniirs, avait un énorme avantage stratégique: il était entouré de hautes formations rocheuses qui barraient la route à d’éventuels assaillants. La seule entrée possible était protégée, barricadée par de hautes murailles et de lourdes portes de pierre et de bois. Plus je m’enfonçais dans les plaines, plus je me rendais compte de la complexité de la situation: il me fallait passer les lignes centaures seule, seulement armée d’un arc, pour aller éliminer un chef de guerre. Mais en plus de cela, il me faudrait m’approcher de son cadavre. Du gâteau… Cela me plaisait, un défi de plus à relever… Petit à petit, un plan commençait à vaguement se former dans mon esprit: je passerais par l’extrême est du blocus, longeant la montagne. Je tenterai de l’escalader, et si j’y parvient, je me retrouverais directement devant la hutte d’Ulgoth, si la carte s’avérait exacte, et il y avait de grandes chances qu’elle le soit. Je n’aurais plus qu’à me débrouiller pour lui caler une flèche entre les deux yeux. Je jetais un oeil à ma carte: je me trouvais au Col de l’Hommepierre, au centre-est de la région. Il fallait que je remonte vers le nord-est et j’en avais apparement pour moins de deux heures: j’arriverais la nuit… Était-ce une bonne chose? Je serais moins repérable en escaladant la colline rocheuse, mais cela rendrait mes tirs bien plus difficiles à réaliser… Quoique le camp serai sûrement éclairé par des torches, et il y aurait bien moins de centaures actifs qu’en plein jour. Je pressais le pas, évitant soigneusement les patrouilles Harathis qui galopaient bruyamment, échangeant entre eux des cris gutturaux. De temps à autre, je voyais de loin un affrontement entre centaures et humains et, discrètement, je tirais une ou deux flèches sans me montrer, et m’éclipsais rapidement par la suite. Je progressais ainsi durant une heure, puis il y eut un brusque changement de décor: la terre sèche et dépourvue de végétation laissa place à une herbe verte et à quelques arbres parci et par là: je vis même quelques biches gambader entre les frênes. C’était la première forêt que je rencontrais depuis plusieurs jours. Cela me faisait mal au coeur, mais la faim me tenaillais, et j’allais avoir besoin de toutes mes forces quand j’arriverai là bas: je brandissais mon arc et abattais l’un des animaux d’une flèche dans la gorge. Je m’agenouillais, saisissait mon couteau et commençais à dépecer l’animal après l’avoir traîné jusqu’à un amas de rocs un peu plus loin. J’allumais un feu entre deux rochers et grillais deux côtes de viande rouge et tendre. Pendant que la viande cuisait, je regardais pensivement la Gorge des Modniirs qui se profilait au loin, éclairée par le soleil qui amorçait son passage sous l’horizon: soit ma vie finirait là bas, auquel cas je mourrais en combattant pour ma mère et pour tous les morts des mains des Centaures, soit je sortirais victorieuse, et je serais libérée de ce poids toute ma vie. Après manger, j’abandonnais à contrecoeur les restes de la biche aux Wargs et aux charognards, et reprenais ma route après avoir éteint le feu de camp.

Les ombres s’allongeaient et étaient sur le point de disparaître alors que je me rapprochais du camp centaure, et je découvrais que l’entrée principale était aux mains des Séraphins: la partie extérieure du quartier général centaure (qui se présentait sous forme de plusieurs camps reliés entre eux, à l’intérieur comme à l’extérieur de l’entrée) était contrôlée par les humains, et la partie intérieure, restait aux Centaures. Les armées étaient si proches les unes des autres que les combattants pouvaient se regarder dans le blanc de l’oeil pendant qu’ils mangeaient où soignaient leurs bléssés, mais aucun combat n’avait lieu tant les deux armées étaient affaiblies. La zone humaine s’arrêtais à quinze mètres de la gigantesque porte, et celle des Centaures, pareil, mais de l’autre côté. L’espace “libre” était chonché de cadavres et de débris. Je bifurquais vers la droite, et me dirigeais vers les saillies rocheuses entourant le quartier général d’Ulgoth le Modniir. Au fur et à mesure que je me rapprochais, je croisais de plus en plus de patrouilles Modniirs et Taminis qui rôdaient autour des positions humaines, mais en me faufilant dans le noir, je parvenais à les éviter, et pas une fois ils ne doutèrent de ma présence: se glisser dans le camp serait un jeu d’enfant grâce à la nuit noire. Une idée folle me traversa l’esprit alors que je passais devant l’entrée des Gorges. J’enlevais mon carquois et comptait mes flèches: quinze… C’était possible…Je changeais de direction: autant passer par la porte… Mais d’abord, j’avais un petit détour à faire…

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Quatres gardes gardaient l’entrée principale, et il n’y avait aucun centaure sur les remparts de bois, car avec leur corps de cheval, ils ne pouvaient pas grimper aux tours de garde et miradors. Cachée dans les taillis environ quinze mètres devant eux, je me préparais à l’attaque. J’attrapais ma première flèche et la décochais sur le garde le plus à droite, en pleine tête. Il s’effondra et ne se releva pas. Ses congénères accoururent et regardèrent devant eux, à la recherche de la provenance de l’attaque. J’en abbatais un second, puis lançais une pierre dans les fourrés plus à droite: la ruse fonctionna, et l’un deux se sépara de son compagnon et se dirigea là où le caillou était retombé. Une dupe vieille comme le monde… Je descendais le centaure resté devant l’entrée, et quand le second se retourna brusquement, me tournant le dos, je l’abbatis également. Vérifiant que personne ne pouvais me voir, je passais rapidement de cadavre en cadavre pour récupérer mes flèches. Pour l’instant, tout se passait parfaitement bien… Mais il restait l’intérieur du camp, et tous les centaures que cela impliquais. Ils mourraient tous, je me sentais prête à les affronter. J’entrais sans tenter de me dissimuler, et six ennemis se tournèrent vers moi, hébétés. J’utilisais la courte seconde que me procurait l’effet de surprise pour envoyer dans l’au-delà l’archer du groupe, mais les cinqs centaures restants foncèrent à tout allure sur moi, leur corps de cheval courant à une vitesse folle. Le premier me chargea en faisant tournoyer son épée, mais je plongeais sur le côté après avoir tiré ma flèche, et la lame s’abbatit à quelques centimètres de moi. Mon tir finit dans l’épaule du Tamini, qui roula sur le sol dans un nuage de poussière en hurlant de rage et de douleur. Je parais la hache d’un autre adversaire avec les lames de mon arc, mais le choc m’envoya valser dans un tintement métallique. Plus sonnée que blessée, je profitais du recul dont je bénéficiais malgré moi pour abattre le centaure à la hache, et je me tournais juste à temps pour éviter une frappe latérale de masse, qui m’aurait certainement arraché la tête. Mais le centaure Modniir avait pris trop de vitesse, et le temps qu’il dérape pour s’arrêter, je le descendait d’une flèche dans la gorge, qui faisait une cible facile. Le dernier ennemi me percuta de plein fouet, et une vive douleur me traversa de part en part, et je roulais sur le sol. Alors que je me relevais, le guerrier vint finir son oeuvre voulu m’embrocher sur son épée. Vive comme l’éclair, l’adrénaline décuplant mes capacités, je roulais sur le côté, donnait une impulsion et lui sautais à la gorge, dans laquelle je plantais mon couteau. Le sang gicla, et je m’effondrais avec la bête. Haletante, je ramassais mon couteau, retrouvais mon arc, et ramassais les flèches. J’achevais au passage le centaure bléssé qui ne parvenait pas à se relever. Je regardais autour de moi: des dizaines de Taminis s’avançaient vers moi, armes à la main. Je déglutis. Quelle idiote je faisais… Je n’aurais jamais dû attaquer ce camp seule. Je me rendais compte maintenant de la folie de mon acte. J’ai vraiment cru à ce moment là que j’allais y passer. Et comme dans un mauvais roman d’un auteur amateur les centaures avançaient vers moi en marchant, hurlant de rage. C’est alors que je me rendis compte que les Taminis n’hurlaient pas… Au contraire, ils s’étaient arrêtés d’avancer pour fixer quelque chose derrière moi. Le hurlement provenait de derrière! Je me retournais pour voir une armée de Séraphins entrer en trombe dans le camp tel un raz-de-marée de fer et de chair se déversant par les portes grandes ouvertes de la Gorge des Modniirs, avec à leur tête un visage familier: Eileen. Tournant le dos aux Séraphins, j’encochais une flèche, souriante: la bataille commençait enfin. Les deux armées se percutèrent violemment dans un combat frontal acharné. Partout dans le camp, les lames tournoyaient et les flèches fusaient. Je remarquais qu’une dizaine de mercenaires gonflaient les rangs Séraphins: élémentalistes, nécromanciens, gardiens et même un rôdeur armé du plus bel arc que je n’avais jamais vu: entièrement constitué de glace éternelle, luisante dans le clair de lune. Il maniait l’arme avec une dextérité déconcertante, et tirait des rafales de flèches si vite que je ne distinguais même plus son bras: il était incroyable… Je perdis mon ancien mentor de vue dès le début de la bataille, mais je n’y prêtais pas attention et me lançais dans la mêlée. Pendant plus de deux heures, le combat fit rage, et aucun des deux camps n’eut l’ascendant sur l’autre. Me battant comme un lion, j’esquivais, parais, sautais, enchaînais les flèches dans la tête et les coups de couteau. Et au bout d’un moment, les centaures furent contraints de reculer, et leurs lignes se brisèrent sous les assauts répétés des humains qui créerent une brèche et s’y engouffrèrent avidement. Profitant de ce moment pour aller jusqu’à la tente d’Ulgoth, loin derrière les Taminis, je m’éclipsais discrètement et me dirigeais vers ma vengeance. Je ne mis pas longtemps avant de trouver Ulgoth: une grande tente aux couleurs chatoyantes dréssée un peu en retrait, protégée par trois gardes, que j’abattais rapidement avant qu’ils ne s’approchent de moi. Ignorant la bataille se déroulant derrière, et laissant le camp à feu et à sang, j’entrais dans la demeure du chef Modniir.

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À peine entrée dans la tente, je recevais un puissant coup de bâton sur la tempe. Je m’effondrais sur le sol, le monde tournant autour de moi, sonnée et aveuglée par la douleur. Il m’attrapa par le col, et me jeta au sol, mais cette fois je parvenais à me relever, à dégainer, et à lui tirer dessus à bout portant. Titubant, je tentais de saisir une autre flèche, mais il fut plus rapide et le puissant centaure m’asséna son long bâton gravé de chef de guerre sur le bras. Faisant tournoyer mon arc, je tentais de l’atteindre avec l’une des deux lames montées au bout mais Ulgoth, d’un coup sec, fit voler mon arc à l’autre bout de la pièce. Nous nous fixâmes l’un l’autre un instant, puis je saisissait une lampe à huilde et, tournant sur moi même, je lui balançais le globe en verre au visage. Il ne vit pas venir l’attaque, et la lampe lui explosa à la figure dans une gerbe de flammes et de verre brisé. Profitant de sa surprise, je roulais sous lui et plantais fermement mon couteau dans la peau tendre de son bas-ventre, lacérant dans le sens de la longueur ses entrailles et sa chair. Je sus à la quantité de sang qui gicla à ce moment là qu’il n’y survivrait pas. Passant derrière lui, je me reculais, laissant le chef Modniir agonisant gémir de douleur. Il vacilla sur ses quatre pattes, et pensant le combat dejà gagné, je bassais ma garde… Mais dans un dernier effort, il se jeta sur moi et me cribla se coups de griffes et de poings, et je parvins juste à lever les bras pour protéger mes yeux. Rassemblant mes forces, je me glissais agilement sur son flanc, et plantais mon couteau dans ses côtes en hurlant:
“Ça c’est pour ma mère!”
Et je continuais, prise d’une folie meurtrière et d’une énérgie nouvelle qui me rendait légère, et comme une balerine mortelle, j’assenais une pluie de coups sur le Modniir, qui tentais de s’enfuir. Aveuglée par la rage et par le sang qui me giclais au visage, je ne remarquais même pas que le centaure au sol se tordait de violentes convulsions, ses pattes battant l’air vainement. Quand je m’arrêtais enfin, le visage entièrement pourpre, je me levais, et, trempant mon index dans le sang, je dessinais une rune sur une peau en cuir pendue dans un coin de la tente. L’inscription sécha et brilla légèrement, puis je me servais de la peau que je tenais par les extrémités pour teindre à jamais mes cheveux de sang centaure. Je contemplais encore le cadavre d’Ulgoth lorsque Eileen et d’autres soldats arrivèrent dans la tente, blessés et pantelants. L’archer se précipita vers moi, son
regard trahissant son inquiétude, et c’est à ce moment là seulement que je réalisais que je me trouvais dans un sale état: coupure à la joue qui saignait abondement, visage couvert de terre et de sang, estafilades aux bras et aux jambes…
“Iryenna… Tes cheveux… Fit Eileen, choqué.
-C’est un choix. Le sang d’Ulgoth, ma vengeance. Je ne savais pas que tu étais dans la région… Merci d’être venu. Sans vous je…
-Ce fut un plaisir d’allumer ces papillons! Heureusement que j’ai su que tu étais passée prévenir de ta petite excursion nocturne. Le commandant du camp n’était pas prêt à intervenir… Me glissa t-il plus discrètement
-Bon, je vais te laisser, maintenant… Je pense que je vais partir.
-Tu nous quittes encore? Iryenna, nous avons besoin d’une archère comme toi dans nos rangs!
-Non. Je veux voir le reste de la Tyrie, je ne resterais pas ici. Désolé.
L’archer soupira, et il y eut un long moment de silence assez gênant, mais il finit par dire:
-Bien. C’est ton choix
-Merci. Que Dwayna te protège.
-Toi aussi”.
Je le saluais et sortais de la tente, attrapais une torche sur un poteau, et traversais le camp plongé dans la pénombre et jonché de cadavres. Les tentes fumaient, calcinées, et la suie recouvrait le sol et flottait dans l’air en tourbillonnant.Ce jour là j’avais fait couler le sang comme je ne l’avais jamais fait, et ce ne serai pas la dernière fois. Sur certains corps, je récupérais mes flèches à la hampe verte et rouge, et les remettais dans mon carquois. J’avais hâte de partir loin, de voir nouveaux horizons, et je pressais le pas car je voulais trouver un endroit où camper le plus vite possible, loin du carnage. Certains soldats Séraphins m’adressaient un salut quand je passais devant eux, d’autres s’inclinaient légèrement, et certains même m’applaudissaient. J’entendis quelquefois le surnom “La Flèche Rouge” lorsque je saluais des groupes de guerriers bléssés et vacillants, mais victorieux, et je souriait en l’entendant. Je comprends maintenant pourquoi ils m’appelaient ainsi, car j’ai vu le rapport de la bataille: on m’attribuait dix-sept victimes, dont le chef Modniir, sur soixante soldats Centaures, alors que plus de trente soldats, et environ vingt mercenaires ou voyageurs avaient combattu cette nuit là.

Depuis ce jour là, je ne fis que voyager, que soit à pied, par bateau, par aéronef ou à cheval. Je voulais toujours plus apprendre, m’améliorer toujours plus à l’arc, et des maîtres archers m’apprirent tout ce qu’ils savaient, qu’ils soient Sylvaris, Norns, Charrs ou Asuras, qu’ils habitent dans les plaines ou dans les montagnes, au nord ou au sud. Je prenais part aux plus grandes chasses: j’ai participé à la mort de Tequatl le Sans-Soleil dans les Marais de Lumillule, et à la chute de la pirate Taïda Covington sur les îles tropicales de la Côte de la Marée Sanglante. J’ai planté mes flèches dans le corps de la Grande Guivre de la Jungle, du Chamane de Svanir dans le blizzard des Congères d’Entreneige, et de la Reine Karka à la Crique du Sud-Soleil. Tout cela m’apporta beaucoup d’or et un peu de renommée, et je recevais même des lettres me demandant de participer à telle ou telle chasse. J’ai exploré la Tonnelle du Crépuscule, et ai bien failli y passer, coincée plusieurs heures durant dans le donjon de lianes et d’épines. Mais c’est après avoir affronté la Griffe de Jormag, que j’ai réalisé qu’en matière de guerre, il me fallait des adversaires plus forts, des missions plus dangereuses, et surtout, avec une cause pour laquelle combattre: la vôtre. J’ai entendu parler de Zhaïtan pour la première fois à l’Arche du Lion, dans une auberge où je séjournais. À ce que j’en avais entendu, une union de toutes les races de Tyrie combattait dans les runes ancestrales d’Orr une invasion de morts-vivants orchestrée par un dragon: Zhaïtan. J’avais déjà combattu les morts-vivants au Mont Maelström, et même jusqu’à la Forêt de Caledon, mais je pensais qu’il s’agissait d’une infection locale, et il va sans dire que je me trompais. J’ai su que c’était là bas là bas qu’il fallait que je combatte. Dès que j’ai pu, j’ai rejoins l’école militaire, mais ce fut une formalité et grâce à mes compétences en archerie, on m’envoyais directement aux cours de stratégie et de maniement des armes de siège. La suite, vous la connaissez: à la sortie de l’académie, j’ai été convoquée ici.

Silencieux, Iryenna et Trahearne se regardèrent longuement: elle attendant sa réponse avec anxiété, lui tentant de digérer ce que lui avait appris la rôdeuse sur sa vie. Il la regardait maintenant d’un autre oeil: par exemple il ne voyait avant que des cheveux teints en rouge, sûrement pour se donner un genre, de la personnalité… Mais maintenant… Et puis il avait du mal à réaliser que la jolie jeune femme qui se tenait devant lui, était en fait une tireuse hors-pair et une combattante d’élite. En tant que chef de l’armée la plus puissante de Tyrie, il avait entendu bien des histoires concernant ses soldats, mais une comme celle-ci… Jamais.
“Vous savez, je crois sincèrement que vous avez un grand avenir dans le Pacte… Bonne chance pour Orr, et merci pour l’histoire.
-C’est Zhaïtan que je veux, et je l’aurai!
-Je n’en doute pas”.
Sur ce, ils se serrèrent la main, et il la raccompagna dans le grand bureau, et la regarda partir d’un pas sûr, dos droit, vers la sortie, ses longs cheveux ondulant derrière elle.

Elle retrouva son compagnon à l’extérieur du fort où elle avait passé l’entretien qui s’était transformé en longue narration de presque deux heures. Ils s’étreignirent longuement, puis il rompit le silence:
" Ils t’ont accepté?
– Oui, et toi?
– Biensûr! Prête à en découdre?
– Et comment Dydou! Ces têtes de Skriits ne vont pas comprendre ce qui leur arrive!"
Laissant derrière eux la gigantesque châtellerie, ils partirent en courant vers les dirigeables qui attendaient, majestueux, les derniers combattants pour Orr.

Zhaïtan tombera quelques années plus tard au dessus de la cité en ruine d’Arah à la suite d’une contre-attaque désespérée du Pacte, et l’on raconte que plus de cent vingt flèches à la hampe verte et rouge auraient été retrouvées plantées dans sa chair. On dénombrera aussi pas loin de cinquante revenants abbatus des mêmes projectiles.